Sorti du taf, je prends la tangente pour décompresser un peu… Petites routes viroleuses, juste comme j’aime…. Mais, il faut bien rentrer… Je me décide donc de regagner la plaine. Je traverse un petit village où la circulation est limitée à 40km/h. Je ne suis pas particulièrement pressé, la chaussée est étroite, pentue et la prudence est de mise.
Devant moi un car postal “m’ouvre” la voie. Il s’arrête…! Je m’avance prudemment pour m’arrêter 4 mètres derrière lui. Pose mes deux pieds à terre. Frein et embrayage serrés.
… et voilà que le car se met à reculer vers moi… P’tain qu’est-ce qu’il fout !!!??? …. Il va s’arrêter, c’est sûr!!!… IL NE M’A PAS VU !!! …. IL VA TAPEEEEER … !!!! Tûûûûûûûûûûtttt !!!!
Je cherche un point de fuiiiiite
A droite un talus… raide…
A gauche un ravin… raide aussi…
Une marche arrière viiiiiite…. (je la cherche toujours cette marche arrière!!!!… si y a quelqu’un qu’y a une idée, je suis preneur…).
Là, je suis raide…
A travers le casque, je sens le souffle chaud de la ventilation du moteur de ce p….n de car…
… BOUUUMMM !!! …
Son pare-chocs commence à “manger” ma roue avant ….!!!
C’est pas que je sois particulièrement peureux… mais là… faut sauver sa peau… Je me retrouve dans un roulé boulé de plusieurs tours – comment je me suis extrait de la bm??? j’en sais fichtrement rien, mais j’ai certainement bien assimilé le “saut de mouton” à mes heures de gloire – … pas de choc … bruit de moto qui tombe … – tout s’enchaine à la vitesse de l’éclair. – et je termine mon roulé-boulé en me rétablissant sur les jambes dans la continuité du mouvement, sans trop savoir comment j’ai fait…
Je me dirige dans la foulée vers la moto que je vois couchée à 3-4 mètres…
Et mes pensées commencent à évoluer vers un … « nan, c’est pas vrai … fait vraiment ch…… » Ma première impression en voyant la moto les quatre fers en l’air est que ce n’est pas brillant … J’ai vraiment les boules et me dis que c’est trop con …
… elle tourne toujours …. coupe circuit …. j’enlève le contact …
Mais voilà que le car repart dans l’autre sens !!! Malgré le fait que je me situe sur le côté droit de la route, le chauffeur ne m’a toujours pas vu !!! Je laisse là mes pensées accablées… et me mets à courir furieusement derrière lui. D’un coup rageur – c’est vrai que là, j’étais chauffé au rouge – j’assène mon poing contre la vitre du véhicule.
Surpris, croyant voir débarquer un extra-terrestre – j’avais encore conservé mon casque – il s’arrête net.
S’ensuit alors une conversation dont je ne reprendrai pas ici les propos tant ils sont confus et … surtout … indélicats pour vos oreilles sensibles. Mais qui pourrait se résumer à :
” @MRKRPXZKRMTFRZ!!!… “
Accompagné cette fois du chauffeur, je m’en retourne vers la moto … à terre la moto … j’aime pas … vraiment pas … garde boue avant sérieusement endommagé, clignoteur en berne … fixation de la bulle quelque part sur la route … moto en appui sur le cylindre gauche et le guidon …
Ch….
Tout s’enchaine à la vitesse de l’éclair. C’est impressionnant les différentes perceptions que l’on a, à ce moment. C’est assez difficile à décrire, mais à postériori, c’est comme si je voulais absolument tout maîtriser, très vite, dans l’urgence du moment et qu’il s’ensuivait – ça dure quelques secondes tout au plus – une incapacité à structurer énormément de choses. Je sais que je dois agir… trouver une solution.
Je ne trouve pas le no de téléphone de la police… (le chauffeur ne s’étant pas calmé, c’est la seule solution que j’entrevois à ce moment là). Les effets cumulés de la peur, de l’adrénaline, de la colère, du stress m’empêchent d’être rationnel. Finalement, c’est mon frère qui le fera (j’avais son no dans les raccourcis de mon portable).
Sur les conseils de son entrepreneur postal, le chauffeur se propose de poursuivre sa course et de me laisser là… Rapidement, je fais quelques photos… piètre témoignage de ce combat inégal entre David et Goliath… euh… Bertha contre Goliath (tout contre, mais alors vraiment tout contre). Je signifie alors au chauffeur qu’il fait “comme il veut”. Il se ravise, percevant au loin une possible dénonciation pour “délit de fuite”.
Avec l’arrivée de la police, je reprends mes esprits, la situation reprenant un rythme plus normal… Le chauffeur reconnaît qu’il ne sait pas assuré de la présence possible d’une personne à l’arrière de son véhicule et admet mon impossibilité à me soustraire à l’inévitable…
Finalement, je demande leur aide pour relever la moto. C’est l’heure d’une première inspection de détail. Mon sentiment se confirme… pas brillant… : radiateur enfoncé, support de bulle cassé, bulle rayée, barre de protection rayée, protège cache culasse cassé, échappement rayé… pffffff….
Pour terminer, c’est en dépanneuse que je regagne la plaine. Bertha sera immobilisée pendant plus d’un mois… rangeant. La totalité des frais seront pris en charge par les cars postaux… une somme tout de même.
Et mes pensées commencent à gamberger… et si nous étions deux sur la moto ce jour là???!!!…